mardi 25 août 2009

H comme Historiographie militaire allemande

- Le Chemin des Dames occupe peu de place dans l’historiographie militaire allemande, « le “trauma” de la Marne et l’ “effondrement” de l’automne 1918 sont les deux pierres angulaires entre lesquelles évolue l’essentiel du débat public et des travaux d’histoire militaire depuis 1919.»
- C’est avant tout des deux journées des 16 et 17 avril 1917 que l’on traite outre-Rhin, afin d’analyser la capacité défensive allemande.

- Le général Hermann von Kuhl, devenu historien amateur et très respecté, publie en 1929 un ouvrage sur la guerre. Celui-ci, derrière les critiques adressées aux Français, lui permet de mettre en avant la cohésion et la stratégie défensive efficace du haut-commandement allemand.
- En effet, la conception allemande a changé avec Ludendorff et Hindenburg (sous l’influence de l’état-major, notamment du colonel Max Bauer), à partir de décembre 1916 : on accepte d’affaiblir la première ligne pour favoriser les contre-attaques, on donne une grande importance aux mitrailleuses et aux « divisions d’intervention », avec une plus grande autonomie de décision des unités combattantes.
- Cette idée de défense en profondeur qui aurait surpris l’état-major français est reprise par Max Schwarte et surtout dans l’énorme synthèse en 14 volumes, Der Weltkrieg 1914-1918, publiée à partir de 1925 (le 12e volume consacré à 1917 paraît en … 1939) par le Reichsarchiv de Potsdam. Pour cet ouvrage, le bilan des combats des 16 et 17 avril est très positif (surtout si on le compare aux pertes en Artois), notamment grâce à la bonne préparation des troupes du Kronprinz, qui s’attendait à une offensive depuis plusieurs moi.
- La manière « défensive » de remporter des victoires marque pour longtemps les conceptions et l’historiographie militaires allemandes, beaucoup plus que l’offensive réussie du 27 mai 1918 par exemple …

- Un autre aspect majeur abordé est « la question de savoir dans quelle mesure les autorités militaires allemandes étaient au courant des mutineries qui secouent, en mai et juin, l’armée française », mutineries fréquemment évoquées dans les ouvrages d’après-guerre, que ce soit dans ceux évoqués plus haut ou dans les souvenirs de Ludendorff parus en 1919.
- « Beaucoup d’éléments laissent à penser que les refus d’obéissance du côté français attirent assez tôt l’attention des troupes allemandes, que ce soit par l’interception des ordres ou par l’intermédiaire des prisonniers. » Mais la vraie prise de conscience de l’ampleur du phénomène est postérieure à l’apogée du mouvement et donc inexploitée (en outre, les abandons de poste côté français sont finalement très rares).
- Les mutineries sont aussi un moyen de mettre en garde contre une conduite trop autoritaire de la guerre et des hommes, mise en garde restée longtemps profondément ancrée aussi bien à l’état-major que parmi les soldats.



Source : Benjamin Ziemann, « Le Chemin des Dames dans l’historiographie militaire allemande », in N. Offenstadt (dir.), op. cit., pages 341 à 349

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