- Bois aujourd’hui disparu situé un peu à l’est de la route Corbeny-Pontavert, à hauteur du carrefour avec celle qui vient de Chevreux et celle qui part La Ville-au-Bois.
- De septembre
1914 à avril 1914, le Bois du / en Bonnet Persan est en première ligne,
marquant la limite entre Français et Allemands ; cette zone disputée
change parfois de main mais jamais ne se trouve hors des tensions et des
combats.
De Gaulle au Bonnet Persan
- Fin novembre
1914, le lieutenant Charles de Gaulle (33e RI) s’ennuie dans cette
nouvelle guerre de position qui l’oblige à attendre et attendre encore …
- « Étant à la cote 87 [Butte de l’Edmond,
NDLA] je décide une reconnaissance
approfondie d'un petit bois dénommé le Bonnet Persan, à mi-chemin entre Corbeny
et moi, entre la tranchée [de plaine ? NDLA : oui] des Allemands et celle du 73e.
Divers renseignements concordent pour affirmer que les Allemands y travaillent
la nuit. J'y envoie une section, Desnoyelles, à 6 heures du soir. […] Desnoyelles envoie 3 patrouilles, une à droite
du bois, une droit dessus, une à gauche. Celle de droite aperçoit bientôt une
vingtaine d'Allemands (il fait un clair de lune splendide) travaillant
paisiblement hors du bois et vers la droite. Les autres voient des sentinelles
apparaître en plusieurs points du bois. Les patrouilles se rapprochent encore,
elles sont ou vues ou entendues, car sur un appel d'une sentinelle les
travailleurs rentrent précipitamment dans le bois, puis plus rien. Tout à coup,
la patrouille de droite aperçoit une ligne nombreuse de tirailleurs allemands
qui, partant du bois, commence déjà à l'envelopper en rampant. Elle prévient
les autres et se carapate à quatre pattes. Dans tout cela, pas un coup de
fusil. Ce que voyant les Boches regagnent le bois. J'arrive sur ces entrefaites
sur le terrain, voulant me donner les allures du deus ex machina. Je porte en avant toute la section de
Desnoyelles mais tout doucement, le fusil chargé et une bonne patrouille à 200
m sur chaque flanc. Nous voici à 300 m du bois toujours sous un clair de lune
implacable. J'arrête là et fais commencer la tranchée. Les hommes assez émus
travaillent avec entrain. Avant le jour la tranchée est finie est très solide,
la section Desnoyelles peut y vivre confortablement tout un jour. Entre-temps,
l'ennemi nous entendant travailler et, inquiet, allume toutes les heures une
petite meulette d'avoine dont un champ voisin est plein. Mais n'étant
évidemment pas couvert lui-même et très désireux qu'on lui fiche la paix, il ne
tire pas un coup de fusil. »
- De Gaulle
souhaite aussi construire un boyau entre cette tranchée et celles du 73e
pour que les Allemands abandonnent le Bois Persan sous la pression constante
des Français. Cependant, son commandant lui fait la réponse suivante : « “Bien ! Mais n’entreprenez rien ainsi dans
le secteur. Vous amènerez des conflagrations. Laissez l'ennemi tranquille au
Bonnet Persan, puisqu'il nous laisse tranquille chez nous !” J'avais envie de
lui répondre : “ Mais le Bonnet Persan c’est chez nous et bien plus loin
encore, jusqu'à la Meuse et au-delà ! ” Je ne répondis rien. À quoi bon ! »
(Charles de
Gaulle, Lettres, notes et carnets
1905-1918, Plon)
La réussite du 255e RI
(septembre 1915)
-
Régulièrement, des coups de main des deux camps ont pour cœur le bois, tel
celui du 36e RI décrit ici par Jérôme Verroust (5 avril 1915)
- A partir de
septembre 1915, le 255e RI s’installe dans le bois de Beaumarais
avec mission première de renforcer les installations déjà bâties et – si
possible – de mener des attaques de diversion en fonction des offensives de
Champagne.
- On décide
donc de construire 3 parallèles solides reliées par des boyaux (comme l’envisageait
De Gaulle). Après celles de Bruxelles et de la Cannebière, la troisième doit se
situer au nord du Bois du Bonnet Persan ; or, celui-ci est occupé par les
Allemands (« on acquiert la
certitude qu’ [il] est entouré d’un
réseau de fil de fer électrifié. » ; on amorce donc la tranchée à
sa gauche, à sa droite, et l’on creuse les boyaux vers l’arrière : « En somme, le travail est poussé de
telle sorte que le Bois en Bonnet Persan soit encadré aussi rapidement et
d’aussi près que possible. »
(source :
JMO 252e Brigade ; il n’existe pas de journal pour le 255e
RI)
- Le 22
septembre, « le sergent Violetinscrivait à la gloire du régiment l’une des pages les plus éclatantes de son
histoire : il réalisait ce prodige d’enlever de jour, avec le seul
concours de deux patrouilleurs, le bois du Bonnet Persan, point d’appui du
front ennemi redoutablement défendu par un triple réseau de fil de fer
électrisé et à l’attaque duquel il avait été antérieurement projeté de lancer
un bataillon » (Historique du 255e RI). Les Allemands,
quasiment encerclés, renoncent en fait à défendre ce saillant au moment où la
situation générale est si tendue).
- Le Bonnet Persan
est donc intégré à la première ligne de défense française. La zone est
difficile, notamment à cause de l’eau dans cette plaine facilement marécageuse ;
rien n’est donc jamais ni stable ni définitif, et l’état-major français donne
sa priorité aux infrastructures situées dans les bois un peu en arrière (les
Allemands dont de même en fortifiant la zone des courtines : Sablière,
Carrière et Persane notamment).
Le Bois en Bonnet Persan lors de
l’offensive Nivelle (1917)
- Début avril
1917, le bois – ou plutôt ce qu’il en reste … – est juste en avant de la
première grande tranchée française (Anspach), entouré de défenses accessoires
(à sa gauche, le poste d’Oran ; à sa gauche celui de Nemours).
- Le 10, le
110e y mène un coup de main dans la soirée, pour constater avec
beaucoup d’amertume que les défenses allemandes sont très peu touchées par la
préparation d’artillerie qui a commencé quelques jours plus tôt ; par
exemple « aucune brèche
n’existe » dans le réseau barbelé.
- Le 12,
nouvelle patrouille : il y a du mieux mais « les réseaux restent encore très denses et
infranchissables » (c’est toujours la même situation le 13).
- L’attaque
étant cependant maintenue, on aménage les lieux en fonction : un parallèle
de départ relie Oran et Nemours, à travers le bois du Bonnet Persan ; un
boyau parcourt celui-ci dans le sens de la longueur pour y acheminer les
troupes le 16 au petit matin …
- La petite
progression des 16 et 17 avril n’entraîne pas de changements profonds pour le
secteur. Ce n’est qu’après les nouvelles poussées de mai (vers la tranchée
Lutzow) que le bois entre dans le cœur du système défensif français.
(Cf. par
exemple cette carte issue du JMO de la 18e DI fin mai 1918)
- Après la
guerre, le site est reboisé. Le bois du Bonnet Persan existe encore dans les
années 1950 avant de disparaître avec le remembrement.
Chronologie : les troupes
françaises au Bois du Bonnet Persan (1914-1917)
(il s’agit d’une
première tentative pour moi ; veuillez excuser les éventuels manques ou
imprécisions, d’autant que le bois a souvent servi de limite entre deux unités)
Septembre-décembre 1914 : 33e RI
Mai 1915 :
127e RI
Mai-août 1915 :
73e RI
Septembre-octobre
1915 : 255e RI
Octobre-novembre
1915 : 412e RI (et 34e
RI)
Novembre
1915-Février 1916 : 110e RI
Février-mai
1916 : 231e RI (jusqu’à sa dissolution)
Juin 1916 :
276e RI
Juin-septembre
1916 : 267e RI
Octobre-décembre 1916 : 66e RIT
Décembre
1916-Janvier 1917 : 131e RI
Janvier-mars
1917 : 327e RI
12 mars-début avril
1917 : 33e RI
16-19 avril
1917 : 110e RI
19 avril-23
avril 1917 : 5e BCP
23 avril-2 mai 1917 :
24e BCP
(Pas de JMO)
3 mai-début
juin 1917 : 66e RI (progression française)
Juin 1917 (le bois n’est plus du tout en première ligne) : 11e et 14e BCP
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