samedi 4 février 2012

B comme Bête et brutale

- Le 17 septembre, le 123e RI est en première ligne dans le vallon de Troyon. Le Chemin des Dames est alors un secteur dit « calme » depuis plusieurs mois (combats de la Creute, janvier 1915). Pour le JMO du jour, peu à signaler sinon des éléments devenus des banalités : « Quelques 105 sur nos tranchées de 3e lignes du 2e bataillon vers 10h. A 1h30 105 et 77 : 1 sergent tué. Quelques dégâts matériels. »


- Pour le sous-lieutenant Maurice Vincent et ses soldats, le quotidien a cependant un autre goût. « La matinée se passe sans incident, mais à douze heures les allemands bombardent vers le 249e puis bientôt sur nous. Notre repas est vite pris. Je fais rentrer mes hommes dans les abris, et c’est à peine si j’y suis rentré moi-même qu’un obus de tombe près de nous. Les éclats atteignent mon sergent à la jambe et à la cuisse. Je le fais asseoir aussitôt et me mets à le panser. Hélas, la blessure qui ne me paraissait pas grave au premier abord, m’en fait découvrir une autre, à la cuisse dont la perte de sang cause une hémorragie. Malgré les ligatures que je fais avec mon ordonnance, le sang coule à flot et il meurt dans mes bras. Pauvre sergent Vinet, pauvre père de deux enfants. C’est avec bien du regret que je l’ai vu emporter par les brancardiers. Je n’en reviens pas de la façon si brutale qu’il a été tué. L’artère fémorale a été tranchée net. Son enterrement a lieu à quatre heures. Malheureusement, je ne puis y assister, le devoir me commande de rester là. Le reste de la journée se passe sans que je ne puisse revenir de cette mort bête et brutale. »
- Trois jours plus tard, lors d’un repos, « je vais faire une prière sur la tombe de mon ancien et regretté sergent. Je l’ai fait arranger. Elle est bien. »
(Source : Maurice Vincent, Carnets de guerre d’un poilu girondin)


Fiche MPF d’Antonin Vinet

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