« Cette fois mon cœur, c’est le grand
voyage,
Nous ne savons pas quand nous reviendrons.
Serons-nous plus fiers, plus fous ou plus
sages ?
Qu’importe, mon cœur, puisque nous
partons !
Avant de partir, mets dans ton bagage
Les plus beaux désirs que nous offrirons
Ne regrette rien, car d’autres visages
Et d’autres amours nous consoleront.
Cette fois, mon cœur, c’est le grand
voyage. »
- Homme de lettres français
- Bordeaux
1886 – Verneuil 1914
- Fin
septembre 1914, le sergent Jean de La Ville de Mirmont quitte sa caserne de
Libourne pour rejoindre le 57e RI (12e compagnie – 3e
bataillon), fortement entamé par les combats des premières semaines de la
guerre (925 hommes en tout constituent ce renfort).
- C’est un
écrivain, déjà reconnu, auteur notamment de Les
dimanches de Jean Dézert (1914) ou de L’Horizon
chimérique (posthume).
- Le 28, il
arrive à Fismes (où il cantonne dans une manufacture de chapeaux) avant, le
lendemain, de rejoindre Cuiry-lès-Chaudardes où une exécution de soldat
l’accueille. Il participe ensuite à l’aménagement du secteur de Craonnelle.
- Après quelques
jours de repos à la mi-octobre, le 57e RI est envoyé autour de
Moussy et Verneuil. Il subit l’attaque allemande sur Soupir début
novembre : « Nous venons de
passer des moments assez durs. Six jours de combat acharné, diurne et nocturne.
Un instant j’ai bien cru y rester, mais c’était précisément le 4 novembre et je
ne pouvais pas tomber pour ton anniversaire ; cela m’a rendu toute
confiance. » (lettre à sa mère, le 6 novembre). Jean reçoit une
citation à l’ordre du régiment le 6 : « Garde-la
pour le cas où je recevrais du fer dans la peau, afin de prouver plus tard à la
jeune Paulette que si son parrain cultivait nonchalamment les muses dans ses
loisirs administratifs, il savait aussi se conduire en bon La Ville sur les
champs de bataille. » (idem, le 10)
- Le 24
novembre, il rédige une dernière lettre à sa mère : « Je ne suis pas encore nommé sous-lieutenant, mais j’en remplis
actuellement les fonctions selon le dernier remaniement de la compagnie. Je
suis en bonne santé et d’excellente humeur, avec le seul regret de vous savoir
inquiets et si loin de moi. Au fond, je suis le plus heureux de vous tous,
car si je suis emporté, j’espère ne pas même m’en apercevoir ; si je suis
blessé, je coucherai dans un bon lit et je serai soigné par d’aimables dames, et
si je persiste tel quel, grâce à toi je n’aurais pas trop froid. Au revoir, ma
chère maman, bons baisers à vous tous. Ton fils si loin et si près de toi – et
sur qui veillent non seulement son étoile, mais toutes les étoiles du
ciel. »
- 28 novembre
1914: nouvelle journée de « bombardement
presque ininterrompu » (JMO). Jean
est touché par un obus sur les pentes du mont de Beaulne. « On s’attendait à le trouver broyé. Or, il était entier et, le
croirez-vous, debout. Enseveli sous des mètres d’argile, il était figé dans sa
dernière attitude à la manière des habitants de Pompéi, saisis dans leur
dernière activité quotidienne par la lave incandescente du Vésuve : le
buste droit, la tête levée, les yeux ouverts, la baïonnette au canon et la
musette au flanc, il s’apprêtait à bondir pour se battre. Il était comme
empêché. C’est une vision qui, depuis, me hante chaque nuit. Un gisant en
action, oui, c’est ça. » (J. Garcin)
- Il est
transporté vers une ambulance mais ne peut être sauvé ; il décède dans les
premières heures du 29.
- Jean est
enterré au cimetière provisoire de Verneuil ; après la guerre, son corps
est transféré à la nécropole de Cerny ; enfin, sa famille le récupère fin
1920. Sa tombe bordelaise est aujourd’hui très délabrée et abandonnée, tandis que
celles de Cerny sont régulièrement entretenues et voient fleurir chaque année
les sédums par milliers…
NB : En
2013, Jérôme Garcin lui consacre un livre qui mêle fiction et faits réels, Bleus horizons (Gallimard)
Citations
issues de : Jean de La Ville de
Mirmont – Œuvres complètes (Editions Champ Vallon, 1992)
(SHD)
(SHD)
Article de Guy
Marival dans la Lettre du Chemin desDames
Le blog du 57e RI, par Bernard Labarbe
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