(MAJ janvier 2011)
- Soldat français
- Nocé (Orne) 1885 – Pargnan 1917
- Agriculteur en 1914, Albert Truton est mobilisé au 103e puis au 75e RI (juin 1915) ; il devient caporal en 1916 (décoré de la croix de guerre pour sa blessure par éclat d’obus).
- Son régiment prend part à l’offensive sur Saint-Quentin fin mars 1917 puis aux combats du Chemin des Dames près de la Caverne du Dragon (fin mai), où les pertes sont terribles.
- Truton participe à la mutinerie de Pargnan et est condamné par le Conseil de guerre le 10 juin (il aurait frappé deux soldats s’opposant aux mutins selon G. Pedroncini) ; le président Poincaré refuse la grâce le 16.
- Le sergent Guillaume raconte : « Le 18, je suis désigné pour une autre mission encore plus pénible : il s’agit de faire partie de la compagnie devant assister à l’exécution d’un caporal du 75e, accusé d’indiscipline et rébellion et pour ces faits condamné à mort. La compagnie d’honneur, si on peut l’appeler ainsi, arrive à 3 heures sur le lieu d’exécution. Il y a une compagnie du 75e, régiment du condamné, une autre du 140e. Nous formons face sur trois côtés, le poteau est au pied de la côte. Un petit moment après, arrive une voiture cellulaire encadrée de cavaliers. Le moment est des plus graves quand sort de celle-ci le condamné ; l’aumônier se tient près de lui. Le jour pointe ; blême, ce caporal écoute l’acte d’accusation et la sentence du conseil de guerre. Il se dirige vers le poteau, se retourne vers l’ensemble du carré et d’une voix pleine de sanglots, s’écrie : ‟Je demande pardon au Bon Dieu, à la France, aux copains, de la faute que j’ai commise.ˮ Deux secondes après, un ‟au revoirˮ qui nous glace d’effroi, il meurt courageusement sous la fusillade du peloton d’exécution. Il tombe à genoux et ensuite sur le côté, tout près de sa fosse qu’il n’aura sans doute pas dû apercevoir. Nos trois compagnies défilent devant le corps et nous rentrons à Oeuilly tout attristés de ce spectacle des plus douloureux. »
- Le 8 juin, avant son procès, il a écrit une lettre à sa femme saisie par la censure (orthographe originale conservée). « Je pense être aquitté mais je sui cassée de caporal et de grande chance que nous allons être changé de régiment […] Enfin cher petite femme ne te fait pas de mauvais sang, ce nempeche pas de avoire ma permission car ces un droit quand mon tour sera arrivé je partirai comme les autres, mes si tu savais cher femme que je pleure car mois qui a jamais été punis jent ai gros sur le cœur. […] Je termine cher femme ma lettre en desirent quelle te trouve en conne sante et ma cher petite fille. Ton mari qui aime pour la vie et qui ne cesse de penser en tois. Mils bon baisers avent de fermer la lettre. Tant que pour me recrire de ce moment attend que je te donne mon adresse. »
- Albert Truton repose aujourd’hui au cimetière de Cerny-en-Laonnois.
Source principale : Denis Rolland, La Grève des tranchées, page 268
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