« Le dimanche 15 avril les commandants d’unités, à tous les échelons, étaient informés par un message sous enveloppe jaune que le jour J était le 16 à l’heure H 6 heures. Depuis trop de jours, dans des conditions matérielles déprimantes et le plus vilain temps, les fantassins attendaient de connaître enfin cette date et cette minute où leur destin rencontrerait l’événement. Quelles qu’eussent été leur confiance et leur résolution, la remise à Dieu de leur sort, leur résignation abandonnée, ils furent naturellement émus : pour beaucoup ce lundi 16 avril 1917 serait le dernier jour leur vie et le Chemin des Dames le chemin de leur mort. On en pouvait faire une complainte. La complainte demeurait au secret des cœurs qui battaient plus vite ou elle s’exprimait en quelques paroles brèves et lourdes : “ Mon vieux – ou mon petit – tu diras à ma femme si je ne reviens pas … Tu écriras à mes parents … Tu ne me laisseras pas tout seul … On ne se lâche pas comme ça … Je n’ai pas peur mais c’est terrible tout de même ! …” La bouleversante révélation ! Puis il faut préparer le barda, envoyer une lettre, manger la soupe une fois encore, une fois encore dormir – si l’on peut. Tout le monde debout à 3h30. La nuit était très noire et il pleuvait toujours. »
René-Gustave Nobécourt, op. cit., page 141
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