- « Aujourd’hui, il est question d’une
affaire bien navrante. Un homme originaire de Camors s’est querellé avec un
officier. Le soldat était ivre et a tiré sur l’autre qui lui cherchait noise.
La balle a éraflé l’épaule de l’officier. Ce n’était pas la première fois que
l’officier s’en prenait à ce soldat-là ; il lui arrivait souvent de lui
faire des histoires, de le menacer de sanctions. A dix heures du soir, Bihouise
était condamné à mort et, à une heure du matin, on l’exécutait : douze
balles dans la peau. A mettre sur le compte de la boisson, une fois de
plus ! Mais, nous pensons cependant tous ici qu’il n’y avait tout de même
pas là de quoi mettre un homme à mort. » (Loeiz Herrieu, Le tournant de la mort)
- François
Bihouise a 36 ans quand commence la guerre ; il est scieur de long à
Camors et célibataire. Le breton est mobilisé au sein du 88e RIT et
se retrouve dans le secteur du Chemin des Dames à partir d’octobre 1914
(Oulches, Vassogne, Oeuilly).
- Le 23
décembre, il est sanctionné de 8 jours de prison par son capitaine pour s’être
enivré (une première punition lui avait été infligé pendant son service
militaire pour le même motif, en 1902).
- François
Bihouise est ensuite affecté comme coiffeur à la Compagnie Hors-Rang de son
régiment, à Blanzy. Le 11 mai 1915 au soir, le caporal Intès le réprimande
alors qu’il est ivre et cause « du
scandale » ; le lendemain, le sous-lieutenant Louis Grillet, à
qui on a rapporté les faits, le réprimande, lui interdit de quitter son
cantonnement et lui promet une punition. Après son repas, l’officier est touché
d’une balle à l’épaule gauche alors qu’il sort de sa « popote » (la blessure est légère selon le compte-rendu
médical).
- On arrête
Bihouise en flagrant délit, l’arme dans les mains, en présence de plusieurs
autres personnes. Celui-ci des défend devant les gendarmes en prétendant que
Grillet l’a menacé de mort (sans pouvoir présenter de témoins pour appuyer ses
dires) et qu’il souhaitait faire peur à son supérieur, non le tuer.
- Après une
enquête rapide confirmant les faits et les dires de l’officier, le général (26e
DI) convoque immédiatement un Conseil de guerre spécial présidé par le
commandant Mathieu (34e RI), qui est accompagné par le
sous-lieutenant Lemoine (10e Hussards) et l’adjudant Delandrevie (34e
RI).
- Bihouise est
condamné à mort (il est jugé coupable de meurtre par préméditation à
l’unanimité, avec guet-apens par 2 juges sur 3), ainsi qu’à la dégradation
militaire.
- Dans la nuit
du 12 au 13 mai 1915, François Bihouise est exécuté à Maizy, sur la route de
Glennes, de huit balles (le coup de grâce est nécessaire), devant les troupes
de la division assemblées en armes.
- Il est
enterré aujourd’hui dans la nécropole nationale de Pontavert.
(Source SHD)